in "Ouest-France", 20 Octobre 2024
Mélanie et Sophie sont devenues amies grâce aux réunions des Alcooliques Anonymes.
Mélanie et Sophie sont à l’initiative d’un nouveau groupe d’Alcooliques Anonymes, à Lesneven (Finistère), afin de répondre à une demande de proximité et aider à leur tour d’autres personnes qui ont besoin d’une « écoute », d’un « partage ».
Mélanie* et Sophie* se voient comme des « abstinentes heureuses ». Après des années à lutter contre la dépendance à l’alcool, elles ont fait de leur combat une force et souhaitent aider les autres. Ensemble. « Les Alcooliques Anonymes (AA) apprennent la sobriété et à gérer leurs émotions, sourit Sophie. Avec les groupes de Landivisiau et Morlaix, j’ai trouvé une nouvelle famille. On a les mêmes problèmes, le même vécu. Sans les AA, je ne serais plus là. »
« L’alcool devait m’aider. Il m’a enfoncée » Cette ancienne aide à domicile, qui a aujourd’hui 51 ans, commence à consommer de l’alcool à 19 ans. « Je me souviens du jour exact, c’était après un choc émotionnel. L’alcool devait m’aider. Il m’a enfoncée. » La dépendance est rapide. Elle boit régulièrement le matin et va travailler avec une bouteille dans le sac. « Personne ne s’en est jamais aperçu. J’avais un masque, ça devait cacher l’haleine. »
Mais Sophie « perd la maîtrise » de sa vie. Elle est hospitalisée. Elle essaie d’arrêter une première fois et reste abstinente pendant sept ans. « Puis j’ai bu un verre de cidre. Quelques jours après, je reprenais le whisky. »
« Ce qui fait tenir, c’est d’aider »
La quinquagénaire est arrivée aux Alcooliques Anonymes, il y a quatre ans. Elle est aujourd’hui fière d’annoncer qu’elle n’a pas bu depuis deux ans et demi. « Même les moules marinières, c’est fini. Je reviens de trop loin. »
Ce qu’elle a trouvé dans le groupe ? « Une renaissance. On a créé des liens. J’y vais deux fois par semaine, ça brise l’isolement. Ce qui fait tenir, c’est d’aider d’autres personnes. »
« Après, j’ai réussi à m’y rendre »
À ses côtés, Mélanie, 68 ans, a un parcours bien différent. Un apéro le samedi, puis le vendredi, puis en semaine… Elle « glisse » progressivement jusqu’à ne plus pouvoir se passer de prendre son mousseux, le soir. Elle perd son permis. Le jour où elle se surprend à trouver des excuses pour ne pas voir ses petits-enfants, elle a le déclic. « La différence entre un gros buveur et un alcoolique ? L’un est festif, l’autre non… »
Pour elle aussi, il y a rechute, avant une hospitalisation. Une infirmière lui parle alors des Alcooliques Anonymes. « Je voyais bien les réunions dans les journaux, mais je n’y allais pas. Des personnes du groupe sont venues me voir chez moi, ce n’est qu’après que j’ai réussi à m’y rendre. »
« Landivisiau, trop loin de Guissény et Lesneven »
Sophie et Mélanie ont toutes deux des médailles sur elles. Celles qui correspondent à leurs mois d’abstinence. Un symbole du travail qu’elles ont mené et qu’elles comptent bien poursuivre. « Dans notre groupe de Landivisiau, des personnes venaient de Guissény et de Lesneven... et elles ont décroché. C’était trop loin de leur domicile. On a donc décidé d’ouvrir un créneau à Lesneven. »
La première séance a eu lieu, lundi 14 octobre 2024, et cinq personnes y ont participé, dont certaines en visio. Malade ou aidant, l’accès est libre, « sans jugement ». Seules « les personnes agressives » ne sont pas les bienvenues. « Quand on se voit, on partage, on rit, on fête les anniversaires de nos abstinences. On les attend ces réunions, on en a besoin. »
Pratique : tous les lundis, à 20 h, au 2, rue des Déportés, à Lesneven (Finistère). Contact : 06 42 23 72 22 ou par mail : aalesneven@laposte.net *
À la demande des personnes que nous avons rencontrées, les prénoms ont été modifiés.