FRANCE : MARCEL M. 50 ANS DE AA

Publié le par kreizker

UN DEMI-SIECLE D'ALCOOLIQUES ANONYMES EN FRANCE

 

"Ce que l'émotion ne m'a pas laissé dire"

 

Le comité de l'organisation du 50 ème anniversaire de l'arrivée de A.A en France m'a proposé de dire quelques mots à l'occasion de la réunion plénière du 14 novembre. Son thème était :"Nous en sommes venus à croire …" Cette phrase constitue la deuxième étape de notre programme. Au lieu d'essayer d'en faire l'analyse, j'ai rédigé quelques lignes que ce sujet m'a évoquées et j'en ai tiré 1500 photocopies que j'ai distribuées.

 

Je m'étais promis d'être bref et de surtout ne pas me perdre en détails dans la narration de nos débuts. Le rapport de Nick H (1960-1963) en constitue un parfait résumé. Dans "Le développement de A.A en France" on peut lire: " Le groupe poursuit son développement et sa croissance, ses problèmes sont ceux que rencontrerait n'importe quel autre groupe". Cette constatation était d'une grande importance. Elle était chargée d'une grande espérance.

 

N'oublions pas que nos amis d'Outre-Atlantique faisaient déjà tout leur possible depuis plus de dix ans pour que A.A s'implante à Paris. Mais la vieille Europe vinicole, avec ses us et coutumes, résistait avec ténacité. A tel point que ceux-ci semblaient avoir érigé une barrière infranchissable.

Nos amis américains dirent, par la suite, que ce groupe si petit et si hétérogène avait servi de catalyseur et avait permis de propager le message en Espagne puis au Portugal et en Italie. "Alcooliques Anonymes" avait fait le tour du monde en 30 ans réussissant à renverser l'obstacle des us et coutumes de l'Europe vinicole.

 

Depuis 1960 je n'ai raté aucun anniversaire et j'ai acquis une longue expérience dans le rôle de vétéran. Je ressens une immense gratitude pour tous les signes de sympathie que je reçois. Bien au-delà de moi-même ils s'adressent à tous mes compagnons des débuts du mouvement et à ceux qui nous transmirent le message avec tant d'abnégation et de tendresse à travers "le langage du coeur".

A l'occasion du dernier anniversaire, peut-être parce que nous étions plus nombreux, peut-être parce qu'un demi-siècle est une durée significative, j'ai ressenti, plus que d' habitude, cette chaleur humaine si particulière aux A.A.

 

Au moment de monter sur l'estrade j'ai trébuché et j'ai failli tomber… Etaient- ce les nerfs… l'âge… l'émotion… ou tout à la fois …?

J'ai commencé à parler et en même temps je contemplais cette immense salle entièrement remplie, telle que nous aimions rêver, à nos débuts, les salles de réunion, parce que cela nous encourageait.

Nous pensions "dans quelques années le problème sera de trouver des salles suffisamment grandes pour nous réunir tous" nous aurons des haut-parleurs, nous passerons des films que nous aurons réalisés nous mêmes, nos structures et nos services seront un exemple à suivre…." Nous ne savions pas, au juste, quelle serait la portée de notre mouvement mais nous savions qu'il était une réponse à l'autodestruction, cause principale de notre maladie et de celle dont souffre l'humanité entière sous mille formes différentes.

Toutes ces pensées m'avaient ému plus que d'habitude. Toutes nos espérances s’étaient réalisées…Mais ils n'étaient plus là mes compagnons du début, ceux qui avaient initié le voyage, ni ceux qui nous avaient transmis le programme et la méthode pour réussir. Ils n'étaient pas là pour voir le succès.

 

Un étrange sentiment de gratitude mêlé d'une sorte de pudeur m'envahit….Je ne pus poursuivre. Je ne pus que dire, en guise de conclusion, que j'avais 87 ans de vie et 50 ans de bonheur. Quand je revins m'asseoir et que je regardai la salle à nouveau, je les vis tous. Tous mes compagnons étaient là. Ils étaient venus, pleins de joie, partager notre même bonheur. Nos désirs étaient accomplis nous avions rêvé la réalité. La salle était comble. Emmanuel Palomino, notre président, qui était là avec nous, a partagé ce sentiment de profonde communion et a été témoin du" miracle".

Plutôt que d'accumuler encore de nombreuses "24 heures" je souhaite les remplir de bonheur et plutôt que les compter je souhaite surtout les vivre.

 

Barcelone, décembre 2010

Manuel de Paris

 

http://www.kreizker.net/article-50-ans-de-sobriete-active-61195955.html

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