La force de dire « non »
in "Sud-Ouest", 12 avril 2013
BIARRITZ Les Alcooliques Anonymes fêtent leurs 30 ans d’existence, aujourd’hui, sur la Côte basque
C’était il y a 20 ans, au bureau. Un vendredi soir, à la perspective du week-end qui l’attendait, une collègue lui dit : « C’est le moment que je préfère de la semaine ! » Cette réflexion, somme toute banale, réveille la conscience de Florence depuis trop longtemps noyée dans l’alcool. « Je suis rentrée à la maison en pleurant. À l’inverse de ma collègue, pour moi, week-end rimait avec enfer. Je savais que celui-là, comme les précédents, je le passerais à boire… Encore une fois, j’allais capituler face à l’alcool. Il est plus fort que quiconque. C’est lui qui calme, qui stimule, qui égaye. Quand il devient votre moteur, vous perdez toute liberté. Ce soir-là donc, j’ai réalisé que ce n’était plus possible. »
Florence pousse alors la porte des Alcooliques anonymes (AA). « Je n’étais pas consciente, avant, que j’étais alcoolique. Je croyais que je buvais parce que j’étais dépressive et que personne ne voyait ma souffrance. Je me leurrais. Boire me rendait dépressive et tout le monde le savait. » Aux AA, elle trouve écoute, aide et réconfort. La soif de s’en sortir l’éloigne depuis vingt ans maintenant de son addiction.
Mieux se faire connaître
Sur la Côte basque (1), les AA existent depuis 30 ans. Pour fêter cet anniversaire, une réunion d’information publique, à laquelle participeront notamment des médecins et un neuropsychiatre, est organisée aujourd’hui à Biarritz (2). « L’idée est de mieux nous faire connaître, souligne Florence. Des gens ont besoin de nous et ne savent peut-être pas que nous pouvons les aider. »
John fait partie de ceux-là. « Je suis abstinent depuis deux ans, souffle-t-il. C’est un long chemin vers le rétablissement. Auparavant, j’ai fait deux cures, j’ai été suivi par un psy… À chaque fois, je replongeais, malgré la présence de ma copine. Les AA étaient mon dernier espoir. Aujourd’hui, ils font partie de ma vie sociale. J’y vais une à deux fois par semaine. J’ai l’impression que si j’arrête maintenant, je ne serai pas assez fort pour résister à l’alcool. J’en ai déjà fait l’expérience… Vous savez, le plus dur ce n’est pas de poser le verre, mais de rester abstinent. » Des membres de l’association Al-Anon, qui vient en aide aux familles et amis d’alcooliques, témoigneront également vendredi. À l’instar de Christiane, qui raconte combien il n’est pas nécessaire de boire pour souffrir de l’alcoolisme. Elle-même avoue être devenue dépendante de la dépendance de son mari. « J’ai vécu 15 ans avec son alcoolisme, raconte-t-elle. J’étais tellement focalisée dessus que finalement mon attitude s’avérait inadaptée face à cette maladie. Celui qui boit, souffre. Face à lui, il faut faire preuve de respect et d’indulgence, sans pour autant être complice. Ne pas juger. » Auprès des membres d’Al-Anon, Christiane reprend confiance. « Je me suis reconstruite. Dans le même temps, mon mari allait chez les AA. Aujourd’hui, la cellule familiale est reconstituée. Tout le monde y a retrouvé sa place. »
(1) Permanence téléphonique pour les AA au 0820 32 68 83. Pour Al-Anon, contacter le 05 59 59 77 85.
(2) Dès 14 h 15 à la Maison des associations, 2 rue Darrichon. Entrée libre.