"Alcoolisme : le déclic quand elle a vu la peur dans les yeux de sa fille"

Publié le par kreizker

RTBF, 25 Octobre 2023

Ma fille devait avoir trois ans et demi. J’ai voulu l’habiller pour aller à l’école. J’ai vu la peur dans ses yeux. Je devais trembler. Je me suis dit que je ne pouvais pas lui infliger ça, une maman constamment alcoolisée". Danny a presque septante ans. Depuis trente ans, elle n’a plus bu une seule goutte d’alcool.

 

Se reconnaître alcoolique est difficile. Beaucoup sont dans le déni. Selon Sciensano, 14% des plus de quinze ans boivent plus de dix verres par semaine. C’est ce qu’on appelle une consommation à risque.

"Le pastis pur à la bouteille. C’était dégueulasse, mais je le buvais quand même !"

"Ça commence petit à petit" explique Danny. "On ne sent pas le moment où on franchit la frontière. Je me suis mariée, j’ai arrêté de travailler. Je pense que c’est l’ennui qui a fait que j’ai commencé à boire en cachette à la maison. Je buvais du pèkèt, tout ce qui était buvable. Je buvais des boissons que je détestais et que je détestais sentir. Notamment l’anis. J’ai commencé à boire le pastis pur à la bouteille !

Je recherchais particulièrement l’oubli sans doute. Le lendemain, je me réveillais et j’avais oublié ce que j’avais bu ! L’exagération dans ma consommation d’alcool a certainement duré plus de dix ans". Danny s’est empoisonnée à l’alcool. Jusqu’à passer une année en chaise roulante pour une "polyneuropathie d’origine alcoolique. Je me suis retrouvée en chaise roulante parce que je ne savais plus marcher. Moi je savais très bien l’origine, mais j’ai laissé faire tous les tests parce que je ne voulais pas l’avouer.

Parfois mon mari trouvait des bouteilles vides que je cachais. Par exemple sous le faux plancher de la garde-robe de mes filles. Il les mettait sur la table comme un trophée : 'tu vois, tu dis que tu ne bois plus, mais voilà un cadavre !' Et je niais. Il y a une petite dizaine d’années, on a encore trouvé une bouteille cachée, alors qu’il y a trente ans que je ne bois plus !"

Les Alcooliques Anonymes

Danny explique que sa sœur a téléphoné à son médecin pour l’avertir de ce problème d’alcool. A la même époque, son mari a entendu parler des Alcooliques Anonymes. Danny est allée à une première réunion, puis aux suivantes et a arrêté de boire. Elle a eu une rechute, mais une membre est venue "la récupérer".

Les mains de Danny ne tremblent plus

Les mains de Danny ne tremblent plus

"Je n’aimais pas l’alcool, mais c’était un besoin. Un besoin physique. Je n’aimais pas l’alcool. Du plaisir à boire, je n’en ai jamais eu. Donc forcément, ça ne me manque pas. Et Dieu merci, l’alcool me fiche la paix. Je n’ai pas de pensées d’alcool, mais ma grande amie à moi, c’est la vigilance. Quelqu’un qui boit trop à côté de moi, je le laisse boire s’il veut, mais moi je m’en vais."

Il y a 200 groupes d’Alcooliques Anonymes en Belgique francophone et à Bruxelles. "La dépendance à l’alcool est définie comme une maladie par l’OMS. […] La médecine n’est pas sans armes (médicaments, cures…), mais peine souvent à maintenir les alcooliques éloignés du produit et à leur rendre une vie de qualité. […] Depuis plus de soixante ans en Belgique, […] le dialogue et le partage entre alcooliques donnent des résultats parfois inespérés. L’abstinence choisie […] permet de reconstruire sa vie" insiste le communiqué de presse de l’association qui tiendra son congrès annuel ce samedi à Francorchamps.

Publié dans AA Belgique

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