Pays basque : « La honte, c’est quelque chose que les femmes alcooliques partagent beaucoup »
in "Sud-Ouest" (France), 12 Mai 2025
Extrait :
Les Alcooliques anonymes ouvrent un espace de parole où les personnes sont disponibles les unes pour les autres, face à la maladie alcoolique.
Les Alcooliques Anonymes organisent une réunion publique, vendredi 16 mai, à Anglet, en ouverture de leur convention régionale. Fanny, Mimosa et Anne témoignent du tabou que représente l’alcoolisme chez les femmes
Les femmes alcooliques, un tabou dans le tabou. Fanny, Mimosa et Anne connaissent ce « sentiment de honte » décuplé pour l’épouse, la mère, la veilleuse du foyer. Si l’alcool est un stigmate universel, personne comme une femme ne ploie sous la peur de décevoir les attentes d’autrui. Les trois dames savent ce poids et l’isolement sans pareil qu’il suppose. Elles l’ont rompu grâce aux Alcooliques Anonymes, les « AA ».
« La honte, c’est quelque chose que les femmes alcooliques partagent beaucoup », expose Mimosa, abstinente depuis 22 ans. « Autour de moi, personne ne savait que j’étais alcoolique. » « On le cache, on trouve tous les moyens de le dissimuler », acquiesce Fanny, qui rencontre depuis 20 ans un secours précieux auprès des Alcooliques Anonymes. Mimosa décrit « beaucoup de culpabilité » chez celles qui doivent tenir le rang socialement assigné. Anne le dit ainsi : « Quand vous êtes une femme, vous devez vous occuper des enfants, de la maison, vous devez aussi assurer au boulot. On attend tout ça d’une femme. » Mimosa définit un recours traître : « Au début, l’alcool peut aider à supporter la charge mentale. On se désinhibe, on a l’impression de faire plus, plus vite et mieux. » Jusqu’à ne plus pouvoir faire sans.
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Maladie des émotions
Fanny a glissé vers l’alcoolisme à la suite de « problèmes familiaux », aggravés d’une dépression. « L’alcool est un très puissant anxiolytique et un anesthésiant », souffle-t-elle. Le deuil, une chute sociale, une maladie, une rupture, le glissement insidieux de la consommation conviviale dans l’asservissement au produit… L’alcoolisme s’insinue de mille façons et nul n’est immunisé. « Il faut un terrain de perturbation émotionnelle », analyse Mimosa. « On parle de la maladie des émotions. »