"Je buvais du matin au soir, mais je n'étais pas alcoolique" : abstinent depuis 29 ans, Jacques raconte la fin du déni et son retour à la vie

Publié le par kreizker

in "France 3 Aquitaine", 17 Mai 2025

Jacques a bu son dernier verre d'alcool, il y a 29 ans. Il a commencé une nouvelle vie

Jacques a bu son dernier verre d'alcool, il y a 29 ans. Il a commencé une nouvelle vie

Jacques, ancien alcoolique, a frôlé la mort du fait de son addiction. Sa rencontre avec les Alcooliques Anonymes a changé sa vie. Il est désormais abstinent depuis 29 ans.

Il préfère garder l'anonymat, c'est pourquoi nous l'appellerons Jacques. Cet habitant du Pays basque a souffert d'une addiction à l'alcool, qui l'a fait descendre au plus bas avant qu'il ne réagisse. Il en est conscient aujourd'hui : il aurait pu en mourir. "Il a fallu que je sois dans un état physique, mental et psychologique tel, que je ne puisse plus vivre sans alcool. Ni vivre avec l'alcool", résume-t-il.

En pleine addiction alcoolique, sa vie a basculé, dans le bon sens, le jour où il a rencontré les AA et entamé son combat intérieur contre l'alcoolisme. Une victoire de chaque jour pour la vie, il n'a plus jamais sombré. Cela fait 29 ans aujourd'hui qu'il a touché son dernier verre d'alcool.

Ancien alcoolique, Jacques (le prénom a été changé) témoigne de sa nouvelle vie, depuis 29 ans sans alcool.

Ancien alcoolique, Jacques (le prénom a été changé) témoigne de sa nouvelle vie, depuis 29 ans sans alcool.

"Dès l'âge de 7 ans"

C'est très jeune que Jacques a appris à connaître les effets de l'alcool. La première fois, "à l'âge de sept ans", en vidant "les fonds de flûtes de champagne, à la maison, en cachette". Cette première sensation d'apaisement, il ne l'oubliera jamais. "J'étais bien", se souvient le Basque qui souffrait à l'époque "d'un mal-être avec les gens, un mal-être en famille" et éprouvait la sensation "de ne jamais être à (sa) place".

"Ce mal-être, dans lequel j'étais depuis que j'étais né, a été immédiatement anesthésié". Le bien-être fugace ressenti ce jour-là a fait l'effet d'une bombe chez le petit garçon qui y trouve une sorte de refuge. 

J'ai su tout de suite que ce produit-là allait m'aider à survivre.

Jacques

Ancien alcoolique

Une "béquille", puis un "déni"

Adolescent, Jacques continue de trouver dans ces gorgées d'alcool du réconfort, de la force pour affronter ne serait-ce que le regard des autres. "À 12-13 ans, je consommais avec les élèves pour croiser le regard d'une jeune fille,"  témoigne-t-il

Il poursuit ainsi sa consommation à l'âge adulte, sans vouloir voir qu'il glisse sur une pente et a même déjà atteint un seuil critique. "Je buvais du matin au soir, mais je n'étais pas "alcoolique"", se persuadait-il alors. "J'étais dans le déni total de l’alcool. Dans ma tête, je n'étais pas alcoolique, car j'avais la vision de quelqu'un dans le caniveau".

Avec l'aide des Alcooliques Anonymes (AA), Jacques a appris a repoussé le premier verre chaque jour.

Avec l'aide des Alcooliques Anonymes (AA), Jacques a appris a repoussé le premier verre chaque jour.

Bientôt, il ne compte plus les verres. Et, il peut le dire aujourd'hui qu'il connaît la définition de la maladie alcoolique, l'addiction était ancrée en lui. C'est "lorsqu'un consommateur boit un verre d'alcool et ne peut plus s'arrêter". Il s'en rend compte, mais ne peut plus lutter.

Depuis longtemps, je savais que ma consommation, abusive mais nécessaire pour moi pour essayer de survivre, allait m'amener à mourir.

Jacques

Ancien alcoolique, abstinent depuis 29 ans

"Bonjour, je suis alcoolique..."

La rencontre avec les Alcooliques Anonymes lui a sauvé la vie. Lors de la première réunion, il ne le sait pas encore. "Bonjour, je m'appelle Jacques et je suis alcoolique", cette phrase, il l'a prononcée sans se rendre compte de l'effet qu'elle produirait sur lui. "Ça a été un soulagement". Le fait de se confier, tout en étant entouré de personnes partageant le même calvaire, a eu un effet libérateur.

Un numéro gratuit est à la disposition de tous pour en parler.

Un numéro gratuit est à la disposition de tous pour en parler.

Auprès des autres alcooliques anonymes, Jacques réalise alors que la maladie fait son œuvre destructrice quel que soit le milieu social ou professionnel. Cet effet miroir lui procure un choc. Mieux, une reconnaissance : il n'est plus seul. 
"On ne vient pas du même milieu, de la même profession, mais ils parlent d'une souffrance de vie qui est la mienne et de cette incapacité à modérer sa consommation d'alcool". Dans ces réunions, il peut enfin partager et échanger sur son vécu et surtout cette "obsession mentale qui se crée à partir du moment où on a bu un verre" : boire le suivant.

Cette rencontre avec les AA, il le dit sans détour, "c'est une naissance pour moi. Une autre vie totalement différente". Sa vie sous alcool, il la voit comme une petite mort. 

C'était une sorte de suicide lent.

Jacques

Ancien alcoolique, abstinent depuis 29 ans

"J'ai arrêté de me fuir par l'addiction", estime Jacques, qui a commencé, après cette première rencontre, a commencé à écouter les conseils des AA et mettre en place un programme sur 24 heures. On lui dit : "Tu devrais essayer de repousser le premier verre". Au bout de 24 heures quand il revient, on lui propose d'essayer 24 h de plus.
A chaque jour suffit sa peine. Avec les AA, Jacques s'engage à se concentrer sur l'instant présent. Au bout d'un an, il se surprend. "C'était subjuguant de me dire que j'avais réussi à ne pas boire pendant un an !", se souvient-il avec satisfaction.

Témoigner pour les autres

Vingt-neuf ans d'abstinence plus tard, Jacques prend aujourd'hui la parole, "pour les autres". Il veut témoigner de cette renaissance grâce à cette mise à distance de l'alcool. Lui-même sait qu'il n'avait pas la capacité à "demander de l'aide", à faire face à cette "acceptation" de soi, où même à utiliser "le verbe essayer".

Parler aujourd'hui ouvertement de cette maladie, "permet de transmettre le message à d'autres personnes qui seraient toujours dans une souffrance de vie à cause de cet alcoolisme". Et peut-être leur offrir, à eux-aussi, un précieux retour à la vraie vie.

 

En savoir plus sur l'association des Alcooliques Anonymes

Publié dans AA france

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