Pour Marcel D., l'alcoolisme est une maladie des émotions, qui a des répercussions à la fois sur le physique, le mental et la spiritualité.
«Mon père avait des problèmes de consommation qu'il n'a jamais avoués. Toute la famille en a souffert. Mon père coupait l'argent pour nourrir sa famille pour en avoir plus pour boire. Donc, j'ai vu les conséquences de l'alcoolisme. J'ai commencé à boire tard, à 21 ans, ce qui était l'âge légal alors pour rentrer dans les hôtels», précise l'homme de 62 ans maintenant.
Une fois le premier verre calé, Marcel a eu beaucoup de difficulté à s'arrêter de boire. Il lui aura fallu dix ans, en fait, pour réaliser qu'il était tombé dans le même piège que son père.
«Quand je ne buvais pas, ça allait. Mais dès que j'en débouchais une, je ne pouvais plus m'arrêter. Je pensais même qu'ils mettaient quelque chose dans la bière pour nous donner soif, mais c'est plus tard que j'ai réalisé que le problème de ma soif incontrôlable était en dedans de moi, et pas dans la bouteille», précise-t-il.
Ainsi, Marcel pouvait boire jusqu'à trois bouteilles de vin par jour, en plus «des petits extras» au menu quotidien.
Enfin le déclic
Puis vint le déclic. Après une «brosse» de trop, et trop forte surtout, Marcel D. a réalisé qu'il donnait à son fils le même exemple que son père lui avait donné à lui. Ouf.
«Ma blonde a dû demander aux voisins de m'aider à me rentrer dans la maison. Mon petit gars d'un an a vu ça! J'avais aussi accroché le bloc appartement avec mon auto. Moi qui avais déjà vu mon père ramper à quatre pattes, là, j'ai décidé que c'était assez.»
Et Marcel a fait appel aux Alcooliques anonymes (AA).
«Le programme des AA est simple: t'apprendre à être heureux sans consommer», explique-t-il.
Le chemin du rétablissement a été parsemé d'embuches. Oh oui. Mais un jour, Marcel D. a avalé sa toute dernière goutte.
Et 30 années ont passé depuis. 30 années... pas si difficiles que l'on pourrait le croire. «Non, je n'ai pas de misère. Et je n'ai pas de mérite, tout simplement parce que je n'ai plus soif», s'exclame-t-il.
Dans les jours les plus difficiles de sa vie, Marcel n'a jamais été tenté de se verser une coupe de vin ou d'acheter une caisse de bière au dépanneur d'à côté. «L'alcool fait juste te geler dans le moment présent, mais quand tu dégèles, ton problème est encore aussi grave, et tu as un problème de plus à régler...»
Il a donc appris à vivre avec la maladie qu'est l'alcoolisme, avec la conscience que s'il rouvre une bouteille un jour, il ne sera pas capable de s'arrêter au bout de quelques gorgées.
«Mon nouveau mode de vie, c'est un jour à la fois. Je peux voir les autres boire de l'alcool et ça ne me dérange pas. Je sais que c'est bon pour les autres, mais pas pour moi. C'est comme si j'y étais allergique», explique-t-il.
Et il donne de son temps chez les AA pour aider ceux qui, comme lui il y a 30 ans, ont reconnu leur problème et sont enfin prêts à mettre les efforts nécessaires pour reprendre le contrôle de leur maladie.
«Donner après avoir reçu, ça fait du bien», reconnaît Marcel.